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NACCO : des mines de charbon pas comme les autres…

J’ai connu cette société grâce à deux blogs (Clark Street Value et Gannon on Investing), suite au spin-off de Hamilton Beach.  Une industrie détestée, un spin-off, un modèle de business peu commun, un profil de baisse limité : autant de raisons de s’intéresser à cette société.

Nacco est une société américaine qui exploite des mines de charbon sur un modèle bien particulier. A l’instar d’autres sociétés minières, qui exploitent des mines et vendent la matière sur le marché aux prix des commodités (et qui sont donc dépendantes de la volatilité des prix), Nacco a un business model qui s’apparente plus à une société de services : elle possède les mines mais vend sous des contrats long-terme à prix fixe le charbon, les fluctuations du prix de marché (« spot coal ») sont ainsi éliminées. Le modèle de revenus est un « management fee » qui comprend le remboursement des coûts opérationnels plus un fee basé sur les tonnages livrés.

Extrait du dernier rapport annuel :

Customer contracts typically are based on a “management fee” approach, whereby North American Coal’s compensation includes reimbursement of all operating costs, plus a comparatively small but consistent fee on each ton of coal or cubic yard of limerock delivered.

Le financement de l’opérationnel de ces mines n’est pas assuré par Nacco mais directement par ses clients (ce qui signifie que la dette n’est pas consolidée dans les comptes et les revenus/coûts non plus). On peut voir les chiffres de ces mines non consolidées dans les « Earnings of unconsolidated mines ». 

Les mines se situent au Dakota du Nord, au Mississipi, en Louisiane et au Nouveau-Mexique (noms des mines : Bisti, Caddo Creek, Camino Real, Coteau, Coyote Creek, Demery, Falkirk, MLMC et Sabine). Coteau, Coyote, Falkirk, MLMC et Sabine sont des mines de lignite et Bisto et Camio des mines de charbon sous-bitumeux, toutes utilisées pour produire de l’électricité. Caddo Creek et Demery (lignite) donnent du charbon actif. Toutes ces mines sont situées à côté de leurs clients et en sont l’unique fournisseur (excepté Camino Real). Une vue sur Google Earth permet de voir que les centrales thermiques sont en effet sur le site minier.

Hormis MLMC, toutes les mines citées ne sont pas consolidéees dans les comptes.

C’est ici que le business est très intéressant : on a une très forte dépendance clients (par la proximité et l’unicité de la ressource en matière). La lignite (ou houille brune) est un charbon de basse qualité : (source)

Compte tenu du faible pouvoir énergétique du lignite, de grandes quantités sont nécessaires pour alimenter des centrales thermiques de forte puissance et le transport n’est pas rentable sur de longues distances. Les centrales thermiques doivent en conséquence être situées à proximité immédiate des mines.

MLMC est consolidée car Nacco supporte tous les coûts et le capital pour faire tourner la mine. Le charbon est vendu sur un prix contractuel ajusté sur des indices d’inflation.

La valeur de Nacco se situe dans ces actifs non consolidés. Non seulement les dettes sont « non-recourse », mais la seule variable d’ajustement sont les tonnages : moins de volumes livrés impliquent moins de revenus. Nous n’avons pas de risque de commodité dans ce business. Les mines ont le même profit par tonne livrée, ajusté de l’inflation avec le temps. Les contrats expirent entre 2022 et 2055. 2022 au plus tôt pour Coteau, avec un renouvellement de 5 ans ou une fin en 2037. S’il y a rupture d’un contrat, le client a un engagement de payer la book value de la mine non consolidée (je rappelle : les mines sont des actifs de Nacco).

Que disent les finances de l’entreprise?

A l’heure de la rédaction de cet article, le bilan est solide et la société ne porte pas de dette long-terme (dette de $15m pour $80m de cash). On pourrait inclure toutes les dettes considérées long-terme (asset retirement & pension obligations, deferred obligations…) pour être plus conservateur et retenir une dette de $135m (soit une dette nette de $55m de dollars). La capitalisation boursière est d’environ 250 millions de dollars et la valeur d’entreprise (capitalisation boursière – cash + dettes long-terme) de 305 millions de dollars.

Si on regarde les tonnages livrés sur 10 ans et qu’on estime les profits par tonnage, on peut avoir une idée de la valeur de ces actifs.

Récap_chiffres

En prenant 35 millions de tonnes de charbon par an, soit environ 5 tonnes par action, et un profit moyen net de l’ordre de $0.9/action, les profits sont de $4.5/action. J’estime que ces profits sont des profits « cash », les D&A sont supérieures aux dépenses d’investissement sur les 3 dernières années et il y a de l’amortissement d’actifs intangibles (entre 2 et 3 millions par an) qui viennent diminuer les profits comptables.

A un cours de l’ordre de 37 dollars l’action, le multiple des profits cash assigné à Nacoal est d’environ 8, ce qui semble relativement bas vu le profil de l’entreprise (business model et profil de risque).

On n’a certainement pas un multi-bagger en puissance avec Nacco, mais le risque de baisse paraît très limité étant donné la solidité du business.

AMF : j’ai des actions Nacco. 

Pour aller plus loin :